Je viens de relire une communication (cf. infra) faite par un groupe de travail constitué de veilleurs professionnels diffusée lors du congrès de la 3AF en 2002 qui n’a quasiment pas vieilli et synthétise bien les paradoxes auxquels nous sommes confrontés dans ce métier.
Au début de l’article les auteurs en citent plusieurs dont :
- Etre communicatif, diffuser pour assurer sa visibilité/Respecter la confidentialité
- Etre généraliste / Dialoguer avec des spécialistes
- Esprit d’analyse/Esprit de synthèse
- A comme mission de trouver des infos pertinentes/ Ne sait pas toujours si elles sont pertinentes
- Diffuse et partage des informations / dans un monde où l’information est pouvoir
- Apporte la nouveauté ou des éléments dérangeants / monde qui n’aime pas changer ni prendre de décisions à risques
- Travaille sur une démarche décisionnelle / travaille sur une démarche opérationnelle
- Est générateur d’idées nouvelles / doit assurer une rentabilité à court terme
- Réactivité / temps restreint pour des produits de veille élaborés et prévoyants
Dur métier effectivement que celui de veilleur. Et encore, l’article date de 2002 et la problématique de la surveillance des réseaux sociaux n’a pas encore émergé sinon pour les forums de discussions (car oui, il existait déjà des veilleurs avant l’émergence des réseaux sociaux, et même avant l’arrivée du web, si, si, j’ai des preuves).
Les auteurs donnent dans le développement de nombreux conseils très utiles car tirés de leur vécu. Pour éviter par exemple que les décideurs aient une vision fantasmée de ce que peut faire un veilleur, ils conseillent de réecrire la fiche de poste et indiquent les critères à y inclure.
Ils appellent également le veilleur à la patience car il « ne connaît pas souvent tous les aspects de cette stratégie ni les rapports des forces qui la déterminent et il n’est pas toujours informé si son jugement était bon et si l’information avait l’utilité supposée, puisqu’ il est peu souvent (voire rarement) destinataire du feed-back de l’information de veille« . Le veilleur qui estime qu’il a raison face à des décideurs n’a peut-être pas toutes les cartes en main ou se heurte aux limites de la rationnalité de ceux-ci, à leurs difficultés à se représenter leur entreprise tel que le reste du monde la voit. On aura tendance à ignorer les informations qui viennent modifier un point de vue ou une prise de décision à venir afin de rester en zone de confort.
En conclusion les auteurs conseillent une approche pragmatique en 5 points :
- donner une image correcte et riche de la mission et des bénéfices que l’entreprise tire du travail fourni par le veilleur, pour une reconnaissance et une légitimité justifiées
- prendre conscience de la contradiction apport d’information utile – absence de pouvoir de décision, avec humilité et ténacité, accepter les règles du jeu et ne pas se laisser envahir par des frustrations inévitables
- dans un approche systémique, être force de proposition et d’innovation en faisant partie d’une équipe projet pour mettre en place un nouveau mode d’organisation
- s’adapter aux exigences des demandeurs, ratisser large ou creuser un sujet particulier en utilisant tous les moyens pour remplir sa mission
- couvrir le long terme comme l’urgent.
Bonsoir Christophe,
C’est assez incroyable de voir que presque 15 ans plus tard, ce papier est toujours d’actualité.
De mon point de vue il y a toutefois quelques évolutions, notamment sur la culture de « l’info-pouvoir » telle que j’aime à l’appeler. S’il y a plusieurs années l’information était un enjeu de carrière, j’ai le sentiment que les postures changent.
Avec l’avènement du web social où l’internaute est à la fois créateur et consommateur d’informations, celui qui détient le pouvoir n’est plus celui qui possède une information, mais celui qui la diffuse au bon moment et aux bonnes personnes ; symbolisé par l’émergence des « curateurs » stars. L’individualisme culturel français est de plus en plus bouleversé par ces nouvelles pratiques.
En tout cas, très bon article qui permet de prendre à nouveau du recul sur nos métiers. Je le partage volontiers à mes lecteurs.
Au plaisir,
Bryan
Hello Christophe,
et merci pour ce bijou.
Se rafraichir la mémoire avec des problématiques qui perdurent,
ça fait du bien.
Donc j’ai appris la leçon, et je te fais ainsi un bon feedback: c’est toujours d’actualité au sein de mon environnement,
et cela me donne la patience pour être force de proposition malgré la culture existante.
Cela m’a donné de nouvelle piste à exploiter.
J’ai adoré ta formation, elle m’a ouvert la voie,
et ton blog est une continuité pour nous accompagner dans notre tâche.
Simplement merci,
et surtout continue ainsi.
Marc.
Bonjour et merci pour l’article.
Je partage la réflexion de Bryan quant à la diffusion ciblée. Je me permets d’ajouter un petit grain de sel.
Développer une véritable analyse de la situation afin de pouvoir anticiper les évènements et non plus les subir est incontournable. Ce travail d’analyse met en lumière que toute information, aussi rapidement transmise soit elle, ne servira à pas grand chose, si la mise en perspective efficace n’est pas réalisée ensuite, et que, finalement, cette information restera information et ne deviendra pas forcément connaissance.
Thanx again pour l’article: je partage.