RessourcesVeille
Suite à la série d’articles que j’ai consacré aux qualités du veilleur, on ma demandé si je distinguais le travail des veilleurs de celui des documentalistes. Ma réponse est oui mais avec des nuances tout de même.
Limage sur laquelle jaime mappuyer quand jévoque ce sujet est empruntée à Bruno Delmas, ancien directeur de lINTD, qui explique que la documentation est à la veille ce que larmée régulière est au commando. Le documentaliste avance en terrain connu en ce sens quil va travailler à partir de sources déjà validées et classées, par lui et/ou dautres. Il exploite donc quotidiennement lexistant, par exemple une base de données payante à laquelle sa société est abonnée, tout comme une armée en campagne quadrille un territoire pour mieux le contrôler. Dans ce contexte la nouveauté apportée par une information originale est contrainte par le type de sources proposé par la base de donnée. Cela ne veut pas dire quil ne pourra rien en tirer dintéressant en terme dinformations susceptibles de permettre de se démarquer (lobjectif ultime de toute veille qui se veut stratégique), mais que le type de sources choisi est en soi une limite à la richesse potentielle de linformation. Par ailleurs, les documentalistes travaillant dans un même secteur dactivité mais dans des organisations concurrentes utilisent bien souvent les mêmes bases de données, la possibilité de détecter linformation qui permettrait de faire la différence est donc théoriquement la même pour tous et leffet discriminant quon peut en attendre forcément plus limité. Jinsiste bien sur le théoriquement, car un documentaliste connaissant bien son secteur dactivité détectera peut-être un signal faible là où un novice ne verra rien. Et inversement! (cf. la conclusion ci-avant).
Sil est facile dacquérir de nouvelles compétences, il lest beaucoup moins de changer de personnalité, mais là encore je me dois de nuancer mon discours puisque ces qualités nont jamais été contradictoires avec le métier de documentaliste, bien au contraire. Il sagira donc plutôt daccepter de modifier ses pratiques de travail et de sortir de la fausse sécurité du plan de classement/thésaurus pour prendre le risque dexplorer le territoire et de le dessiner au fil de ses découvertes.
Stimulant!
Suite à la série d’articles que j’ai consacré aux qualités du veilleur, on ma demandé si je distinguais le travail des veilleurs de celui des documentalistes. Ma réponse est oui mais avec des nuances tout de même.
Limage sur laquelle jaime mappuyer quand jévoque ce sujet est empruntée à Bruno Delmas, ancien directeur de lINTD, qui explique que la documentation est à la veille ce que larmée régulière est au commando. Le documentaliste avance en terrain connu en ce sens quil va travailler à partir de sources déjà validées et classées, par lui et/ou dautres. Il exploite donc quotidiennement lexistant, par exemple une base de données payante à laquelle sa société est abonnée, tout comme une armée en campagne quadrille un territoire pour mieux le contrôler. Dans ce contexte la nouveauté apportée par une information originale est contrainte par le type de sources proposé par la base de donnée. Cela ne veut pas dire quil ne pourra rien en tirer dintéressant en terme dinformations susceptibles de permettre de se démarquer (lobjectif ultime de toute veille qui se veut stratégique), mais que le type de sources choisi est en soi une limite à la richesse potentielle de linformation. Par ailleurs, les documentalistes travaillant dans un même secteur dactivité mais dans des organisations concurrentes utilisent bien souvent les mêmes bases de données, la possibilité de détecter linformation qui permettrait de faire la différence est donc théoriquement la même pour tous et leffet discriminant quon peut en attendre forcément plus limité. Jinsiste bien sur le théoriquement, car un documentaliste connaissant bien son secteur dactivité détectera peut-être un signal faible là où un novice ne verra rien. Et inversement! (cf. la conclusion ci-avant).
Le veilleur se distingue du documentaliste en ce quil est prêt à faire feu de tout bois. Pour lui chaque source dinformation est bonne à prendre, quil sagisse dun billet de blog, dun twitt ou dun bruit de couloir, doù la nécessité de ne jamais attendre pour mettre en place une veille sur les nouveaux espaces où lon cause (voir ce que je disais des
blogs en mai 2004 ou de Twitter en octobre 2008). On va me dire quil doit tout de même vérifier la qualité de sa source et la véracité de linformation et je ne pourrais que répondre oui, sauf que… à la différence des sources classiques (presse, bases de données), assez aisément recoupables entre elles, linformation de type signal faible peut très bien ne provenir que dune seule source (avec le risque dintox que cela implique) dont il sera impossible de valider rapidement la qualité. Doit-on pour cette raison ne pas en tenir compte ? Bien sûr que non. Il y a nécessité dune prise de risque de la part du veilleur dans le choix de transmettre ou non linformation (cf. ci-dessus : vendre de lincertitude). Doù limportance là encore de sappuyer sur un groupe dexperts qui laidera à valider lintérêt et la portée des informations quil capte (sans plus parvenir à une position définitive dailleurs). Intégrer la veille dans son organisation cest accepter la prise de risque et, toutes proportions gardées, cest cet aspect qui rapproche lesprit veilleur de lesprit commando : il faut explorer, défricher un terrain que lon ne connaît pas, décider en permanence des directions à prendre (par exemple le type de sources à choisir pour adresser telle question) ou des éléments auxquels on va accorder du crédit parmi ceux que lon aura collecté. La veille cest lintégration du facteur risque dans la documentation classique. Risque que lon tente de réduire pour lorganisation pour laquelle on travaille mais également prise de risque du veilleur dans les choix quil devra effectuer, car il doit par exemple évaluer en permanence le temps quune piste pourrait lui faire perdre ou gagner dans un mode de réflexion de type probabiliste, qui est heureusement le mode de fonctionnement par défaut de notre cerveau.Les documentalistes sont de plus en plus nombreux à faire de la veille et les récentes études sur la profession (notamment
létude Serda parue en 2009) indiquent que cela va aller croissant. Pour les plus jeunes pas de problème, les formations ont évolué et intégrent les pratiques de veille, certaines depuis une bonne décennie maintenant. Pour les documentalistes de la génération précédente ou ceux qui nont pas encore été confrontés à la mise en place dune veille, il y a souvent la nécessité de sortir de sa zone de confort pour comprendre et intégrer cette nouvelle pratique. Dit comme cela ça à lair assez simple mais comme le démontre tout cet article, la veille nécessite une tournure desprit particulière qui ne sacquiert pas facilement car elle est construite sur des traits de personnalité : la paresse rusée, la curiosité et limagination.Sil est facile dacquérir de nouvelles compétences, il lest beaucoup moins de changer de personnalité, mais là encore je me dois de nuancer mon discours puisque ces qualités nont jamais été contradictoires avec le métier de documentaliste, bien au contraire. Il sagira donc plutôt daccepter de modifier ses pratiques de travail et de sortir de la fausse sécurité du plan de classement/thésaurus pour prendre le risque dexplorer le territoire et de le dessiner au fil de ses découvertes.
Stimulant!