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Le numéro 3119 de Télérama (fin octobre) est consacré au design. Bon je dois avouer que c’est un sujet auquel je ne connais rien et c’est sans doute la raison pour laquelle j’ai choisi, parmi la trentaine de pages du dossier, l’interview de la seule personne dont le nom me disait quelquechose, l’omniprésent Philippe Starck. Je n’ai pas été déçu.
Philippe Starck ne dit pas qu’il a eu raison avant tout le monde mais explique pourquoi :-)
Autrement dit il donne accès au processus créatif qui lui a permis d’anticiper et donc de prendre de bonnes décisions. Il rappelle d’ailleurs que dans les années 60 il a proposé à des gros fabricants français une chaise à accoudoir parce qu’il avait vu que « les gens allaient rester à table plus longtemps, et que le salon, la salle à manger allaient finir par se confondre ». Bien sûr ces entreprises n’en ont pas voulu et Starck de commenter :
« j’ai mis un point d’honneur à leur refuser ce qui a fait la fortune des éditeurs italiens ces vingt dernières années. Ils n’avaient vraiment pas le droit de dire « Non, c’est de la création, on ne fait pas ça!« »
Pour ce qui est de la veille je n’ai pas eu l’impression qu’il s’agissait chez lui de quelque chose de formalisé. En fait, comme beaucoup d’artistes, Starck est un capteur de tendances né qui explique sa créativité par le « magma » :
« je sais cultiver mon « magma » : je suis tout le temps en train de faire des corrélations, de classer. je suis un spécialiste de l’organisation aux rayons X. En fait, je suis très bon pour comprendre les signes inconscients d’une société, comprendre où ça va, pourquoi (…) ça me permet de stocker des bouts d’intelligence plus ou moins cuits, plus ou moins en phase de polissage final. »
C’est ce même « magma » qui fait qu’un veilleur se pose les bonnes questions, émet des hypothèses, suit les bonnes pistes, sur le web ou ailleurs, analyse les informations dont il dispose de manière originale, créative.
C’est en tout cas ce « magma » qui a permis à Starck de s’imposer … et de produire vers la fin de l’entretien quelques réflexions que je trouve intéressantes venant de lui car quasi schizophréniques :
« Dans une société matérialiste comme la nôtre, toute question amène une réponse matérielle, comme si on ne pouvait pas répondre à quelqu’un sans lui refourguer un produit ! (…) Le travail de designer doit être politique. En se demandant comment sauver de la matière, comment produire de l’énergie, comment changer l’esprit de gens, les dégoûter de l’achat de compensation du samedi après-midi. »
Ou encore cette percée vers le transhumanisme :
« Je ne suis pas un homme de l’objet mais du concept. (…) Nous sommes la seule espèce qui contrôle la qualité de sa vitesse d’évolution. Or on refuse de comprendre nos mutations. (…) Pourquoi ne pas accepter ainsi notre entrée dans le bionisme, le mélange du corps et des composants (…), mélange qui va nous aider à maintenir notre vitesse d’évolution. »